12/14/2010

1968: le Parti communiste réunionnais condamne l’écrasement du Printemps de Prague (1).




Le 21 Août 1968, les troupes du Pacte de Varsovie envahissent la Tchécoslovaquie, mettant fin par la force au « Printemps de Prague », mouvement d’émancipation de masse initié au sommet du Parti communiste tchécoslovaque (PCT) et soutenu par la population tchécoslovaque.

Le « Printemps de Prague » trouve son origine dans le programme de réforme et de démocratisation engagé depuis 1967 par le PCT. Sur le plan économique, les transformations engagées visaient à la décentralisation, à l’accroissement de la rentabilité des entreprises publiques, au contrôle des finances et à l’introduction de mécanisme de marché maîtrisés au sein l’économie socialiste.

Le caractère politique de la réforme s'affirme lorsqu’en Avril 1968, le Secrétaire Général Aleksander Dubček prononce un célèbre discours proclamant l’avènement du « socialisme à visage humain » , fondé sur le respect des droits humains et politiques.

Les dirigeants soviétiques, qui avaient un temps apporté leur soutien à Dubček, et qui, même sans bienveillance, auraient pu tolérer la mise en place des réformes, sont en revanche fort inquiets des effets potentiels de ces transformations sur l’unité du Bloc de l’Est ; ces craintes sont renforcées par les interventions répétées, auprès du Kremlin, d’une minorité de dirigeants tchécoslovaque conservatrice, qui poussent à une intervention du Pacte de Varsovie contre leur propre pays.

Allant jusqu’à invoquer l’exemple des Brigades internationales espagnoles, les dirigeant soviétiques tentent, peu après l’invasion, de justifier l’intervention par un prétendu « appel au secours » du peuple Tchécoslovaque, en danger d’être submergé par les « forces contre-révolutionnaires ».

C’est en réalité dans la détestation unanime que cette armée de 600.000 hommes franchitaux cris de « vive le socialisme », un Etat à direction communiste.

L'invasion met les dirigeants communistes au pied du mur: faut-il, au nom de l’unité du camp socialiste et de la défense de l’URSS, admettre un agissement si contraire aux principes du droit des peuples à disposer d'eux-même et à l'indépendance des partis communistes portés par Marx, Engels et Lénine ?

S’il se trouva peu de partis communistes dans le monde pour approuver le coup de force, la majorité des réactions s’exprimèrent en terme plus que modérés et ambigus. En France, la "réprobation" sincère prononcée par les instances du PCF réunies d'urgence par Waldeck-Rochet est frappée d'équivoque lorsque des personnalités telles que Janette Vermeersh et Jacques Duclos expriment leur soutien à la "normalisation".

Position des communistes à La Réunion

Le PCR prononca pour sa part une condamnation dont la fermeté tranchait avec les réactions en demi teinte de la plupart des organisations communistes; le PCR s'élevait ainsi contre le puissant parti d’Union soviétique, malgré la précarité à laquelle le contraignait la violence politique du camp dit " départementaliste".

Un tel choix était alors lourd de conséquence : bien que le rapport dit « Khroutchev » du 24 Février 1956 ait mis fin à l’extrême concentration à Moscou de la légitimité socialiste – l’un des traits distinctifs du système stalinien-, l’URSS continuait de peser lourdement sur les destinées du mouvement progressiste international.

Pourtant, là où Michel Debré, alors ministre gaulliste des Affaires étrangères, anticommuniste et "patron" de la droite réunionnaise, ne voulut voir qu’un « grave accident de parcours », le Comité central du PCR réuni le 25 Août condamna sans ambiguïté l'intervention soviétique, soulignant l'hypothèque que celle-ci faisait peser sur le devenir de l'internationalisme.

L'histoire a validé cette analyse : le discrédit que jeta l'invasion de la Tchécoslovaquie sur le mouvement communiste international lui fut fatal. L'intervention du Pacte de Varsovie fut aussi, comme l'a noté l'historien Eric J Hobsbawm, au principe d'un désanchantement qui, outre de nombreux militants progressistes dans le monde, atteignît les dirigeants communistes eux-même; elle peut être considéré comme l'un des éléments déterminants de la chute de l’Union soviétique et de ses alliés, à peine vingt-cinq ans plus tard.

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